Avant que de partir je me lègue à moi-même/Pour faire de ce site un asile hanté./Heureux qui comme moi, pressent dans ce qu'il aime/ La forme et la couleur de son éternité. Germaine Beaumont

Lumière matin







La vie est belle, la vie est moche
La vie est un miracle, un miracle qui cloche
Parfois, souvent
On ne voudrait voir que les arbres
Feuillées de sistres, jouets de vent
Ce serait si facile d'oublier les cadavres
Couchés devant.
Les roses poussent du fumier ras les dents,
Pourtant elles sont belles, les abeilles boivent dedans.
Le laid et le beau, le noir, le blanc
L'amour et la haine, s'affrontent tout le temps.
Étrange ce monde où grouille le vivant
Sans cesse à la peine, ivre de son néant
Et que le mouvement entraîne toujours plus loin devant
Oubliant que tout saigne sur les roses, pourtant...




2007

Vive la Vie




On peut être foutrement heureux
dans la seule compagnie du ciel, des arbres
et de soi-même...


2009 

Savane







Minuit. L’air étouffe sous la poigne de l’été
Des guépards électriques et véloces
Courent dans l’herbe jaune des crêtes de nuage,
A la poursuite d’un troupeau noir de gnous,
Egarés de terreur, bientôt acculés
Aux remparts infranchissables de la montagne.
Et la peur pressant leur chair jusqu’au cœur
Tombent enfin les premières gouttes de sueur
Sur la savane hirsute des tours surchauffées….


2007

Phénix








Certain soirs
Quand l’immense fatigue, entre ses mâchoires me broie
Qu’elle ne laisse rien du soleil, juste des pluies dans ma chair
Je me dis qu’il faut que tout s’arrête-là.
Alors, je me quitte et voyage
Tentant de trouver après les au-delà, la chaleur d’une braise,
Même juste une étincelle de mes anciennes forges
Pour me bouter le feu, renaître encore une fois.


2009

Froid dans le dos




Tu étais là
comme deux ailes
entre mes épaules
avant la Porte
l'arrachement de la naissance.

Tu en as perdu la mémoire.

J'en ai retrouvé peu à peu
l'effroi.

C'est un sel dans ma bouche,
un déséquilibre quand je marche,
une absence de poids dans le réel
pour n'y poser rien qu'un pas.

Il me faut vivre connaissant
ton absence,
marcher bancale et blessée
en attendant l'autre monde
où nous serons ré-assemblés.


2016
Choi Xooang

La Cerise sur le Prunier






J’ai beaucoup observé
Du creux de mon enfance, avec curiosité
Et la tête penchée.

Même en bande j’étais solitaire, la cerise sur le prunier
Le coquelicot dans les blés, j’étais sans cesse à la traîne
En arrière, à côté.

Je n’étais pas comme eux,
J’avais dix siècles de silence au fond des yeux.

Je riais, je jouais, j’avais l’air d’un papillon
Que même l’air ne touche pas
Mais je portais déjà la gravité des jours
Posée en travers de l'âme
Comme un bât.


2009

Cantal







Auvergnats!
J'ai laissé hier dans votre vert pays
la part la plus brillante de mon être
je vous ai laissé mon fils chéri.
J'ai laissé derrière moi la moitié de mon coeur
et aujourd'hui je ne bats plus qu'à demi.
Dans vos terres soulevées de volcans
j'ai niché mon fils, mon petit,
si jeune encore dans ses vingt ans.
Pour la première fois ma famille,
le soleil autour duquel je tourne
-et qui me garde en vie-
est écartelée, ses membres dispersés.
Il y a des centaines de kilomètres
et tant de longues heures, entre mes bras et Lui.
Auvergnats, votre pays est beau
j'espère vos âmes jolies,
généreuses et accueillantes à mon petit.
Car à cette heure c'est chez vous qu'il s'éveille
et sourit...


2011

Cantal







Paysages de paix posés dans l'immobilité du Temps.
Vert Cantal
aux hameaux gris doux lovés dans leurs écrins sylvestres.
Forêts, forêts,
hachées de pâturages calmes où paissent les bêtes.
Maisonnettes de contes, coiffées de lauzes en cornettes
aux petits yeux de petites fenêtres.
Pays froid, pays doux, pays d'eau et de lait
pays étincelant et modeste,
hérissé de croix et de Vierges,
tu as perché ta foi au plus près de ton Dieu,
et hissé tes églises tout au bout des cheminées
qui témoignent de l'ardeur de ta terre.
Tes vallées intimes sinuent entre tes volcans assagis
succession de paisibles beautés où le sourire s'étire
et le regard se perd.
Cantal, vert Cantal
enchantement pur sous un ciel grand ouvert.
Profusion des parfums nobles d'une nature claire,
senteur vive des sapins, sensuelle des sous-bois,
et celle rude aux nez citadins, des vaches et des chèvres.
Cantal, vert Cantal, je t'adopte
transforme en amour mon chagrin
et par mon fils, je te fais mien.


2011

Muse à louer







Cherche Muse.
Cherche un prince, un gueux, un ciel
Un bretteur de moulins, une étoile
Même petite
Mais qui luise fort dans ma nuit bleu marine.
Cherche un monsieur loyal
Un paladin quêtant la rose dans mon jardin
Un noble coeur
Accroché au firmament, un matin
Encore dans ses voiles.
Cherche un roc fidèle sous mes seuls pieds
Solitaire mais pas de pierre
Cherche doux et bon, solide mais fragile
Pensées à suivre, matière pour me nourrir
Espaces à rêver.

Cherche Muse nouvelle, pour poésie à inventer.



2009

S'en fout







S'en fout les miaulements
les guilis-guilis
les souris, le rose bonbon
s'en fout de toutes ces conneries
ces menteries
qui creusent le ventre
et l'esprit.
S'en fout de tout
veut plus souffrir, envoie au diable
les faux amours
les faux amis
l'est pas un jouet
dont on jouit
mordra les doigts et les non-dits
en veut plus de tout ce fourbis
ces petits tours et puis s'en vont
des marionnettes et des flons-flons
du manège qui donne le tournis
veut du solide, du concret
du sincère, du vrai
sinon s'en fout
s'en fout, s'en fout, s'en fout!
Sent tout, prend tout
dans la gueule,
s'en fout pas quand ça uppercute sec
les dents qui volent
et le coeur qui pète
ramasse vite sa pauv'tête
et puis se répète
comme un mantra
un pansement raplapla
qu'elle s'en fout
que c'est la seule voie
alors s'en fout
souffre mille morts mais s'en fout
s'en fout, s'en fout, s'en fout...
Et si c'est pas vrai
tant pis, s'en foutra aussi.

L'Aveu tranquille


J'aurai passé ma vie à plier mes chimères
En angles origamis pour capter la lumière
Remisant l'essentiel dans de grands tiroirs gris,
A doucement rêver des songes interdits.

L'échine ployée en deux, de tellement de détresse
Alors que la passion vibrait aux courbes coronaires,
Brûlant tout le bois tendre de mon peu de sagesse,
Pulsant à l'embraser, le ciel des jugulaires.

J'aurai passé ma vie, de fuites en défaites
L'âme un peu hésitante, complètement fracturée
D'éclairs fuligineux et d'oeil de tempêtes
Et puis d'élans d'amour à tout incendier.

Je me serai nourrie de fantasmes honnêtes
Rageusement volés aux arbres du péché
Et ton corps et mon corps ne seront à la fête
Car seules nos illusions, ont appris à s'aimer.

J'aurai passé ma vie sauvagement sincère
A gueuler mon amour à trop de gens pressés
Qui voulaient rester sourds car n'en sachant que faire,
Jetant mes mots de miel aux ronces des fossés.

Car mon drame secret, c'est d'être juste passante
Juste au coin du miroir, le reflet du reflet,
Quand je meurs de n'être accueillie en infante
A la cène des tendres, aveugles patentés...

J'aurai passé ma vie à traverser les vôtres
En m'excusant tout le temps, d'avoir dérangé.
Quand j'osais espérer après m'être éloignée,
Entendre simplement votre cœur soupirer,
Dans un aveu tranquille: «Comme tu m'as manqué ».


2006

Solo






Il y a un oiseau qui chante.
Tout seul
Dans la pièce et dans sa cage.
Tout seul
Avec son chant sans écho.

Et plus il chante, plus monte la joie de la trille
Plus son chant devient mélodieux.
L'oiseau est au monde
et son chant le lui rappelle.

Je suis l'oiseau.
Toute seule
Dans la pièce et dans ma cage
J'écris

et ma joie est immense.

Aimer encore









Aimer
C'est aussi renoncer à débattre.
Non par lassitude
Mais par éblouissement.
C'est voir l'extrême vacuité de tout
Des mots
De l'élan guerrier du point de vue
Des dogmes
C'est choisir délibérément
D'être en paix
En lumière, en soi, pour soi
Sans l'autre souvent
C'est lui abandonner la joie
Aussi vaine soit-elle
D'une victoire
Et savoir jusqu'au coeur de son coeur
Que l'on a fait dans un sourire d'amour vrai
Le bon choix.



2014

Fil à fil







Fil d'or, fil d'air
qui nous lie par les reins
comme gerbe
de blés blonds
de lumière
et nos têtes nos pensées
toujours se frôlent
se caressent se cajolent
veillent
l'un à l'autre
quand nos nuques ploient
pleines de la grâce
d'un amour d'or
et d'air.


2016

Poudre d'Or








Mon enfance s'éloigne
m'en demeure des effluves blonds,
des parfums flottant dans des étés en poussière,
des lambeaux dorés de bonheur calme.

La fillette rentre au bercail,
elle s'éloigne, je la libère
n'ai plus tant besoin de puiser à deux mains
dans son eau légère
la transparence de ses rivières.

Mon enfance s'éloigne, retourne au poudroiement
de l'immortelle mémoire.


2017

OctOBre







Octobre s'allonge sur la page
en rondeurs lascives
plein de seins, de fesses et de cuisses.
Il a la peau dorée, le cheveux roux
et l'oeillade humide.


../..


Octobre pour mieux nous voir
a mis lorgnon et lunettes.
Grand chambellan paré de cuivre et d'or
de damasquin, de ciselures
il annonce la bouche ronde, la venue prochaine
de Décembre, le roi vénérable.
Entre ces deux lumières, Novembre
comme un fils maudit. 

Tu quoque fili?


2009